(Ce texte est un récit fictif. Il s’inspire de situations vécues par des patients ayant de l’oxygénothérapie à domicile, mais ne correspond pas à un témoignage réel.)
Quand on m’a annoncé que je ne rentrerais pas chez moi seul, mais avec une machine, j’ai eu l’impression qu’on ajoutait une ombre au tableau. On a prononcé les mots : oxygénothérapie à domicile. Derrière, j’ai tout de suite imaginé des tuyaux, un bruit continu, un fil à la patte. Comme si mon souffle m’échappait et que je devais l’emprunter à une machine.
Quelques jours plus tard, ce sont les techniciens d’un PSAD qui ont franchi ma porte. Ils ont déposé le matériel, branché, expliqué. J’écoutais, mais j’avais surtout cette pensée : “C’est donc ça, ma nouvelle vie ?” Le concentrateur d’oxygène, discret et imposant à la fois, a pris sa place dans mon salon. Je ne savais pas encore si je devais le regarder comme un intrus ou comme un allié.
Il y a eu ce moment étrange, le soir même : ma maison, mon silence habituel… et ce souffle mécanique qui s’est mis à remplir l’espace. Pas assourdissant, pas agressif, mais présent. J’ai eu du mal à trouver ma place dans ce décor modifié. Respirer devait me soulager, et pourtant, ça me rappelait sans cesse que je n’étais plus tout à fait autonome.

Découvrir l’oxygénothérapie à domicile
L’annonce en elle-même avait déjà tout bouleversé, mais c’est en voyant le matériel arriver que j’ai compris l’ampleur du changement. Les techniciens PSAD sont venus avec des cartons, des câbles, des explications rapides mais précises. Je hochais la tête, je prenais des notes, mais au fond, je n’entendais qu’une seule chose : désormais, je dépendrais de ce concentrateur pour respirer.
La machine, une fois installée, semblait banale. Un boîtier blanc, quelques voyants lumineux, un long tuyau translucide. Rien d’effrayant en apparence. Pourtant, le simple fait qu’elle tourne sans cesse a transformé l’ambiance de ma maison. Le silence familier a laissé place à un souffle artificiel, régulier, presque trop régulier. J’avais l’impression qu’il se calait sur mon propre rythme respiratoire, et ça me troublait.
Les techniciens m’ont montré les gestes simples : changer la tubulure, vérifier le débit, faire attention à l’humidité. Sur le moment, ça m’a paru énorme. Une partie de moi pensait : “Je ne saurai jamais gérer tout ça.” Et en même temps, je voyais bien qu’ils faisaient tout pour que je me sente capable. Un numéro d’appel, une visite prévue pour contrôler, des mots rassurants.
La première nuit a été la plus étrange. Je me suis couché avec le tuyau posé le long de ma joue, la peur qu’il se débranche, qu’il s’emmêle. J’ai attendu le sommeil, mais je n’entendais que la machine. Elle me donnait de l’air, c’était vital, et pourtant elle volait un peu de mon intimité.
Avec les jours, j’ai commencé à apprivoiser cette présence. Le matin, je vérifiais les voyants comme on jette un œil à la météo. L’après-midi, je tirais doucement la tubulure pour me déplacer, découvrant que je pouvais encore aller chercher un verre d’eau ou regarder par la fenêtre. Petit à petit, la dépendance s’est teintée d’habitude. Ce concentrateur, que je craignais comme un fardeau, est devenu un compagnon discret, aussi encombrant qu’indispensable.
Le quotidien réinventé
Très vite, j’ai compris que l’oxygénothérapie à domicile n’était pas seulement un appareil posé dans un coin du salon. C’était une nouvelle organisation de vie. Chaque geste banal — se lever, se laver, sortir de la chambre — passait désormais par le filtre du tuyau, du débit, de l’autonomie.
Le matin, avant même de préparer mon café, je vérifiais la machine. Les voyants, le bruit, la tubulure bien en place. Un rituel nouveau, aussi automatique que de se brosser les dents. J’ai appris à dérouler le tuyau dans la maison sans le coincer dans une porte, à enrouler les mètres de plastique comme on plie un linge trop long.
Sortir, c’était une autre aventure. Les techniciens PSAD m’avaient laissé une bouteille portable, censée m’accompagner dans mes déplacements. J’avais l’impression de voyager avec une valise, même pour descendre à la boulangerie. Les premiers jours, chaque sortie ressemblait à une expédition. Puis, à force, ça s’est banalisé. Le voisin qui me voyait traîner mon petit sac d’oxygène finissait par ne plus y prêter attention. Moi, j’avais encore parfois la sensation d’afficher ma fragilité en public.
À la maison, les gestes ordinaires se sont transformés. Ranger, cuisiner, lire un livre : tout se faisait avec le tuyau comme fil conducteur. Je devais apprendre à bouger plus lentement, à accepter de m’arrêter avant d’être épuisé. Ce n’était pas seulement une question de souffle, mais aussi d’écoute de mon corps.
Et puis il y avait les visites régulières des techniciens PSAD. Ils entraient, contrôlaient, changeaient un filtre, ajustaient un réglage. Leur présence était à la fois rassurante et intrusive. Rassurante, parce que je savais que je n’étais pas seul avec ce matériel. Intrusive, parce qu’ils entraient dans mon intimité, rappelaient à chaque fois que ma maison était devenue un espace médicalisé.
Avec le temps, j’ai fini par trouver un équilibre. Le bruit de la machine s’est fondu dans le décor, les mètres de tuyau se sont faits plus familiers. J’avais perdu une part de spontanéité, mais j’avais gagné quelque chose de précieux : la possibilité de continuer à vivre, même différemment.
Le regard des autres et la vie sociale
Si m’habituer à la machine chez moi a demandé du temps, affronter le monde extérieur avec l’oxygénothérapie à domicile a été une autre étape. Dans ma maison, le tuyau et le bruit du concentrateur finissaient par se fondre dans le décor. Mais dehors, impossible de passer inaperçu.
La première fois que je suis sorti avec la bouteille d’oxygène portable, j’avais l’impression que tout le quartier me regardait. Ce sac, ce petit tuyau qui remontait vers mon visage, c’était comme une pancarte disant : “Il est malade.” Certains croisaient mon regard avec curiosité, d’autres détournaient les yeux, gênés. Et puis il y a ceux qui posent des questions, parfois maladroites, parfois bienveillantes. “Ça doit être lourd à porter ?” ou “Vous en avez pour longtemps ?” On apprend à sourire, à répondre brièvement, ou à esquiver.
Avec les amis proches, la gêne a été plus subtile. Inviter quelqu’un à dîner signifiait expliquer qu’il y aurait la machine en bruit de fond. Aller chez eux demandait de prévoir l’autonomie de la bouteille, vérifier que l’air ne manquerait pas en plein repas. Ces détails logistiques deviennent invisibles pour les autres, mais ils pèsent lourd quand on veut simplement partager un moment.
La vie intime, elle aussi, se trouve bousculée. Comment être naturel quand un tuyau court le long de votre visage ? Comment oublier le souffle mécanique à côté du lit ? Ce sont des questions que l’on n’ose pas toujours poser, mais qui s’imposent dans les gestes du quotidien. Certains soirs, je m’imaginais que la machine faisait partie de la scène, comme une tierce présence discrète mais incontournable.
Petit à petit, pourtant, les choses changent. Les voisins ne voient plus la bouteille, les amis s’habituent, la famille intègre les contraintes. Moi-même, je cesse de penser à chaque seconde à ce tuyau. Ce qui paraissait une différence insurmontable au début devient un trait de vie, ni plus ni moins.
Retrouver un souffle, mais apprendre la prudence
Avec le temps, l’oxygénothérapie à domicile a cessé d’être seulement une contrainte. J’ai découvert aussi ce qu’elle m’apportait : de petites victoires qui, pour moi, avaient des allures de montagnes gravies. Monter l’escalier sans m’arrêter tous les deux pas. Pouvoir tenir une conversation sans haleter au bout de trois phrases. Marcher jusqu’à l’arrêt de bus sans avoir l’impression que ma poitrine allait exploser. Chaque progrès me rappelait que ce souffle supplémentaire n’était pas un luxe, mais une chance.
Pourtant, derrière ces améliorations, il y avait toujours une vigilance de tous les instants. La machine ne quittait jamais vraiment mon esprit. J’avais appris à tendre l’oreille au moindre changement de son, à vérifier les voyants lumineux comme on vérifie une ceinture de sécurité. La peur d’une panne, d’un tuyau mal branché ou d’une autonomie trop courte m’accompagnait partout.
Les techniciens PSAD venaient régulièrement pour vérifier que tout fonctionnait. Leur passage, c’était un soulagement et une piqûre de rappel à la fois. D’un côté, je savais que mon matériel était suivi, entretenu, surveillé. De l’autre, leur présence me rappelait que je ne pouvais plus prétendre mener une vie “comme avant”.
Il y avait aussi cette fragilité invisible. Respirer mieux grâce à la machine ne signifiait pas être guéri. La fatigue restait là, tapie dans les gestes trop longs ou les journées trop denses. Je me surprenais parfois à oublier mes limites, à vouloir faire “comme avant”, pour ensuite payer l’effort par une lassitude écrasante.
Alors j’ai compris que l’oxygène, c’était un équilibre : un allié qui me donnait de l’air, mais qui me rappelait en permanence la fragilité de ce souffle. J’avais gagné de l’autonomie, mais aussi appris la prudence. Avancer, oui, mais sans jamais oublier que ce fil de plastique me liait à une machine indispensable.
Une réflexion qui reste ouverte
Aujourd’hui encore, je ne sais pas si je vois l’oxygénothérapie à domicile comme une contrainte ou comme une seconde chance. Sans elle, mes journées seraient étouffantes. Avec elle, elles sont différentes, rythmées, parfois limitées. C’est une cohabitation étrange : on aimerait l’oublier, mais on sait qu’elle est là, essentielle.
Les visites des techniciens PSAD, le souffle discret du concentrateur, la bouteille qu’on prépare avant de sortir… tout cela s’est tissé dans mon quotidien comme un fil invisible. On pourrait croire que ça enferme. Et pourtant, ça ouvre aussi : la possibilité de rester chez soi, de partager encore un repas, de sentir le vent en marchant quelques pas dehors.
Alors, est-ce que cette machine me définit ? Je ne crois pas. Elle fait partie de mon décor, de mon rythme, mais pas de mon identité. Au fond, c’est peut-être ça la vraie question : comment continuer à être soi, quand une partie de son souffle dépend d’un dispositif médical ?