L’importance du sommeil réparateur après une hospitalisation

Je me souviens de Jacqueline, 78 ans, rentrée chez elle après trois semaines d’hospitalisation pour une fracture du col du fémur. Le chirurgien était content, la radio bonne, le dossier clôturé. Mais pour elle, ce n’était pas fini. Les nuits étaient hachées, les douleurs réveillaient à 4 heures du matin, et cette sensation étrange de vide dans la maison n’arrangeait rien. Et elle n’est pas un cas isolé. Vous l’avez peut-être vécu aussi.

Dur de trouver le sommeil en rentrant à la maison

Une fatigue qui ne disparaît pas avec la sortie

En tant que professionnel de santé, j’ai souvent vu ce “faux retour au calme”. Le séjour à l’hôpital épuise, mais rentrer chez soi avec un corps fragilisé, un moral en pointillés, ce n’est pas une sinécure. Et le sommeil, souvent, en prend un coup. Dans certains cas, on parle même de “dette de sommeil post-hospitalière”. Moi, j’y vois surtout une accumulation d’inconforts mal adressés.

L’impact du rythme hospitalier

Le rythme hospitalier laisse des traces : lumières la nuit, réveils précoces pour les prises de sang, soins interrompus. Une fois rentré, on voudrait récupérer, mais l’organisme reste en alerte. Et puis il y a ce qu’on ne voit pas : les inquiétudes, les pertes de repères, la gêne à demander de l’aide… Un jour, une dame m’a soufflé : “Je dors mal, pas à cause de la douleur, mais parce que je ne sais plus comment vivre seule.”

Le sommeil ne suffit pas à lui seul

Une fonction essentielle mais fragile

Oui, bien dormir est indispensable. Je ne vous dirai jamais le contraire. Le sommeil favorise la cicatrisation, calme les inflammations, apaise l’anxiété. C’est un moteur de réparation. Mais il ne fonctionne pas en vase clos. Il faut lui donner les bonnes conditions.

Des exemples concrets de déséquilibres

Prenez l’exemple d’un patient que j’ai suivi il y a quelques années. Il dormait mal, malgré les somnifères prescrits à l’hôpital. En discutant, on s’est rendu compte qu’il buvait un litre de jus de fruits au dîner, grignotait sucré tard le soir, et ne savait pas exactement à quelle heure prendre ses médicaments. Et comme son voisin de palier passait la télé jusqu’à minuit… pas étonnant que le sommeil ne vienne pas.

Quand le problème dépasse le sommeil lui-même

Le problème, ce n’est pas toujours “le sommeil”. C’est ce qu’il reflète. Un déséquilibre alimentaire, une douleur sous-estimée, un sentiment d’insécurité. Il m’est arrivé d’intervenir auprès de familles qui me disaient : “On ne comprend pas, tout va bien, mais elle ne dort pas.” Et parfois, c’était juste une lampe trop forte dans le couloir, une radio qui grésille la nuit, ou l’absence d’un appel attendu.

Être seul ou mal entouré, ça change tout

Dormir seul, c’est aussi craindre d’être seul

Vous savez, beaucoup de gens pensent que la solitude, c’est une affaire de silence. En réalité, c’est une affaire d’inquiétude. Dormir seul après une hospitalisation, ce n’est pas juste poser sa tête sur l’oreiller. C’est aussi se demander : “Et si je tombe ? Et si personne ne vient demain ?”

Quand une simple organisation apaise

Une patiente que j’ai accompagnée dormait mieux non pas parce qu’on avait changé son oreiller, mais parce qu’on avait mis en place un petit planning d’appels. Une voisine le matin, son fils le soir, et un passage infirmier l’après-midi. Ce simple cadre l’a rassurée. Résultat ? Des nuits sans réveils inutiles. C’est ça aussi, le soin : prévoir ce qui va apaiser l’esprit.

Penser aussi aux aidants

Et puis il y a les aidants. Ces proches qui veillent, souvent sans relâche. Eux aussi dorment peu. Eux aussi s’épuisent. Et quand ils craquent, c’est tout l’équilibre qui vacille. J’ai toujours encouragé les familles à penser à eux aussi : un relai, une aide ponctuelle, une oreille extérieure. Car un aidant en forme, c’est aussi un patient plus serein.

Ce n’est pas une question de checklist

On aimerait que ce soit simple…

On aimerait vous dire “voici les 5 règles d’or pour bien dormir”. Mais ce serait malhonnête. Oui, certaines choses aident : limiter les excitants, structurer ses journées, s’exposer à la lumière le matin, créer un environnement calme. Mais j’ai vu des personnes appliquer tout ça à la lettre… sans effet.

L’élément émotionnel souvent oublié

Pourquoi ? Parce qu’elles avaient peur. Ou se sentaient coupables. Ou n’étaient tout simplement pas prêtes à “laisser aller”. Le sommeil, après l’hôpital, demande parfois du temps. Et surtout, une attention globale.

Des petits ajustements, souvent très efficaces

Il faut poser les bonnes questions : le traitement est-il compris ? la personne mange-t-elle bien ? a-t-elle des douleurs mal exprimées ? est-elle rassurée sur ce qui l’attend demain ? Parfois, améliorer le sommeil, c’est simplement clarifier un doute, réparer un petit inconfort ou redonner un minimum de contrôle. Une dame m’a un jour avoué qu’elle ne dormait bien que lorsqu’on lui disait clairement le programme du lendemain. “Je veux savoir quand on vient, et pourquoi.” C’est tout bête, mais cette transparence avait apaisé son sommeil plus sûrement qu’une tisane.

Tout est lié, et c’est ça qui est beau (et compliqué)

Le sommeil, miroir du quotidien

Le sommeil est comme un miroir. Il reflète la qualité de tout ce qui l’entoure : la journée vécue, les douleurs apaisées (ou pas), les repas pris dans le calme, les échanges humains, la clarté du traitement. Quand tout s’aligne, le sommeil revient, souvent sans bruit. Mais quand un maillon manque, c’est toute la chaîne qui cliquette.

Créer les conditions favorables

Alors non, il ne suffit pas de dire “il faut dormir pour guérir”. Il faut créer les conditions pour que ce sommeil devienne possible. Et ça passe par des gestes simples, des attentions concrètes, et parfois, une oreille attentive plus qu’un médicament.

Observer, écouter, poser les bonnes questions

Mon conseil ? Observez. Écoutez. Parlez. Que vous soyez concerné vous-même ou proche aidant, posez des questions, osez dire “je ne comprends pas” ou “je me sens perdu”. Car c’est dans ces échanges que naît souvent la solution.

Et si je devais retenir une chose après toutes ces années dans les soins à domicile, c’est celle-ci : un patient qui dort bien, ce n’est pas un hasard. C’est le fruit d’un accompagnement global, humain, ajusté. Ce n’est pas parfait, mais c’est possible. Et franchement utile.

En résumé

Si vous ou un proche traversez cette période difficile après l’hôpital, retenez ceci : les troubles du sommeil sont normaux et temporaires. Ne restez pas seul avec vos inquiétudes.

Trois actions simples à mettre en place :

  • Parlez de vos difficultés à votre médecin ou infirmier
  • Organisez un minimum de présence rassurante (famille, voisins, professionnels)
  • Identifiez ce qui vous préoccupe vraiment : douleur, traitement, peur, solitude

Le sommeil reviendra, mais il a besoin de temps et de bienveillance. Et n’hésitez jamais à demander de l’aide : c’est le premier pas vers des nuits plus sereines.

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